In conversation : Yvanovitch MBAYA : restitue l’essence Africaine dans le blanc.
Entre danses et tourments, l’œuvre de Yvanovitch MBAYA centrée autour du mouvement - du corps, de l’histoire rend hommage aux racines africaines. Finalement l’individu n’est que prétexte à explorer la riche identité de l’homme africain et une invitation à la reconnection avec ses origine afin de forger une identité complète. Invité à exposer son travail aux côtés de celui d’Aboudramane DOUMBOUYA dans le cadre du projet monument ABLAKASSA présenté à AKAA, Yvanovitch MBAYA retrace la genèse de son parcours artistique, animé par un profond désir de découvrir l'Afrique en profondeur, depuis Brazzaville où il a grandi. Interview.
Ngalula MAFWATA : Quelle est la genèse de votre sensibilité artistique ?
Yvanovitch MBAYA : J’ai grandi à Brazzaville, d’une mère moitié angolaise et d’un père congolais. J’ai toujours été attiré par le dessin, une passion partagée dans ma famille : mon père était architecte, et mon frère, topographe, dessinait aussi beaucoup. Je me souviens de notre grande encyclopédie illustrée à la maison, avec des images de personnalités, savants et œuvres d’art, qui me plaisaient particulièrement, surtout celles de la Renaissance italienne. À la fin de mon parcours secondaire, je me prédestinais à suivre un parcours économique afin d’honorer mes parents en prenant une filière dite de réussite. Seulement à ma grande surprise mon père m’a inscrit aux Beaux Arts de Brazzaville et que je vais débuter l’année qui suit.
Ngalula MAFWATA : C’est rare d’avoir des parents qui soutiennent une carrière artistique dès le départ.
Yvanovitch MBAYA : Oui, et j’en ai vraiment pris conscience en arrivant en Europe. Mon père avait trouvé un compromis, car aux Beaux-Arts de Brazzaville, on forme avant tout des professeurs d’arts plastiques, assurant ainsi un avenir stable. À l’époque, le seul lieu qui promouvait une autre vision de l’art contemporain, comme celle de l’École de Poto-Poto, était l’Institut Français.
S’en suit pour Yvanovitch MBAYA un parcours aux Beaux-Arts de Brazzaville emprunt à la découverte à la l’étude de mouvements artistiques dont l’arte povera italien (‘art pauvre’ né dans les années 1960) lequel il sourira une passion particulière étant en miroir avec le travail de récupération d’objets usés, industriels très présent parmi les artistes congolais faute de matériel disponible :
“Je peignais déjà, et faisais des collages avec des lames de rasoir. Les Beaux Arts m’ont permis de connaître davantage sur les techniques et l’histoire de l’art en parcourant les différents mouvements qui en anime le fil. Cependant j’avais cette soif de histoire de l’art africain, du Congo.”
Ngalula MAFWATA : Le voyage fait également parti de votre parcours, quel en a été l’impact dans votre démarche artistique ?
Yvanovitch MBAYA : Jeune étudiant rebelle mais conscient de mon avenir, j’ai eu l’opportunité de faire un échange aux Beaux Arts de Kinshasa. Kinshasa est un atelier à ciel ouvert où il y a beaucoup d’inventivité, de récupération. J’y ai appris beaucoup d’histoires, mythes et traditions congolaises. Le livre de Lucie TOUYA Mami Wata la Sirène et les peintres populaires de Kinshasa m’a particulièrement saisi au point de me rendre sur le port de Kinshasa pour en découvrir l’histoire; c’est ainsi qu’a débuté mon désir pour la recherche. À la fin de mes études passé longues heures à l’Institut Français pour approfondir mes connaissances et y ai rencontré le médiathécaire et comédien M. Louis MOUMBOUNOU. Je cherchais à assister et accompagner un artiste qui pourrait m’accueillir et c’est qu’il me recommanda à Mme Bill KOUÉLANY artiste plasticienne de Brazzaville confirmée à l’international. Après un premier échec, elle accepta finalement que je rejoigne son atelier en tant que premier assistant. J’ai assisté aux premiers pas des Ateliers SAHM et au lancement des rencontres annuelles organisées avec les artistes d’autres pays africains. Après deux éditions j’ai su qu’il était temps pour moi d’explorer.
Débute alors une épopée africaine pour le jeune artiste qui décide d’explorer l’ouest du continent afin de nourrir son projet de recherche centré autour de L’Identité, la quête du sens de la vie et la richesse congolaise émanant de ses traditions et religions. Un voyage à moto qui le conduira au Togo en premier lieu dans les ateliers de nombreux artistes:
Cette immersion a nourri mon œuvre, me permettant de tisser des liens profonds avec les croyances traditionnelles. Ce processus m’a ensuite poussé à voyager dans d’autres pays à la rencontre de mythes et récits traditionnels, formant ainsi les bases de mon travail. Puis, un certain 11 avril 2015, j'ai décidé d'explorer de nouveaux horizons en partant pour le nord de l'Afrique. Ce qui devait être un séjour d'une semaine à Casablanca s'est transformé, au gré des rencontres, en un voyage de neuf ans.
Ngalula MAFWATA : Ce voyage semble avoir été formateur et influant également ?
Yvanovitch MBAYA : À l’époque, je travaillais à l’acrylique et réalisais des collages lorsque, qu’une goutte de café tombée par inadvertance sur mon œuvre. J’ai été immédiatement séduit par les nuances de couleur que cela créait. Interpelé j’ai pensé à la peau et à la terre. L’Afrique de l’Ouest représente la Terre Mère de par les nombreux brassages qu’elle a connue notamment venant du Kongo lors des déportations des peuples. Ce pèlerinage que j’ai effectué était pour moi une façon de récupérer des fragments d’histoire, de comprendre les influences. En explorant, j’ai découvert l’importance du café dans l’identité africaine, utilisé dans les pratiques traditionnelles et comme pigment, presque comme une drogue dans le monde arabe, où il fut même interdit par un sultan pour ses propriétés d’excitant. Le café est ainsi devenu un élément personnel, que j’utilise encore aujourd’hui dans mon art.
Ngalula MAFWATA : En parlant d’identité, cette silhouette masculine, humaine dans différentes positions, que représente-elle ?
Yvanovitch MBAYA : Quand j’étais au Congo j’étais aveugle. Quand on me parlait de fantômes, de pratiques traditionnelles, je pensais tout de suite à la magie noire. Je ne jette pas la pierre à l’occident, il s’agit juste de différences culturelles. Chez nous, on vénère ceux qui sont là et qui sont partis. Mon travail s’articule autour de trois dimensions : les dessins, les toiles de coton suspendues, et les tissus récupérés. Mes dessins, souvent, représentent des silhouettes. D’ailleurs l’artiste Abdelkbir Radi m’a souvent dit que j’étais le seul artiste capable de dessiner des enfants noirs en blanc, que je réussissais à capturer cette essence unique. Cela part de la tradition africaine qui représente l’esprit en blanc. L’esprit chez nous n’est pas obscure ou ne doit susciter la peur, au contraire, c’est la présence de l’esprit des ancêtres. Le blanc est une couleur pure. En Afrique de l’Ouest par exemple, les femmes qui sont autorisées à prier et à invoquer les esprits des eaux et les sirènes sont appelées les Mamissis. De même au Brésil avec les femmes Bahia qui font ces cérémonies vêtues de blanc avec des perles. Un code que reprend les pratiques Vaudou au Togo, Bénin ou encore en Haïti. Le rouge revient dans les pratiques traditionnelles Ngunza du Congo que j’évoque beaucoup dans mon travail qui lui représente la force et la puissance.
“Je cherche à représenter l’identité à travers un message d’universalité et de reconnecter les africains d’Afrique et de la diaspora. Certains ont perdu un morceau de leur histoire car ils ne sont pas nés sur le continent et n’ont pas encore la curiosité de creuser, d’aller vers cet héritage culturel qui ne demande qu’à être redécouvert. Je parle de ce métissage dans mon travail. ”
Yvanovitch MBAYA : Certains ont perdu un morceau de leur histoire car ils ne sont pas nés sur le continent et n’ont pas encore la curiosité de creuser, d’aller vers cet héritage culturel qui ne demande qu’à être redécouvert. Je parle de ce métissage dans mon travail. Mon travail explore également l'esprit de l'identité, permettant à chacun de s'y retrouver dans un message qui évoque avant tout l'humanité. Toutefois, il est vrai que je me concentre sur la représentation des corps noirs, qu'ils soient masculins ou féminins, car ce sont les références que je connais le mieux et d'où je puise ma force créative. Michel-Ange, par exemple, sculptait avec une grâce particulière les formes du corps masculin, ce qui m'a beaucoup inspiré. J'aspire à capturer cette beauté à travers les courbures et les lignes parfaites, retraçant ainsi des silhouettes qui parlent de notre histoire et de notre essence.
Ngalula MAFWATA : Lien entre héritage bantu et spiritualité , restaurer une part de connaissance
Yvanovitch MBAYA : J’ai pratiqué la danse contemporaine et la manière dont je comprends la danse contemporaine c’est la notion d’identité mise en opposition à soi-même. C'est une lutte intérieure pour déterminer comment positionner son corps, se mouvoir, occuper l'espace et le mettre en valeur. J'ai eu la chance de travailler avec deux danseurs, Aïpeur FOUNDOU que l’on appel le Dieu danseur, ainsi qu’avec Dethmer NZABA alliant des éléments des danses traditionnelles Ngunza et du Butõ japonais, qui met l'accent sur le lyrisme. La danse Ngunza, quant à elle, est animée par la transe, le Mpevé où l'esprit et le corps s'expriment ensemble, soulignant ainsi l'importance de la parole dans cette pratique. Les religions bantus enseignent l'importance des racines, des ancêtres et des dieux. Il existe le Dieu de l’Occident et le Dieu d’Afrique. Je suis croyant et je crois en un unique Dieu, créateur de tout, bien que nos manières d’invoquer ce Dieu diffèrent. À travers mon travail, je m'efforce de mettre en lumière nos traditions et nos façons d'invoquer nos divinités. Cela se traduit par des postures qui fusionnent les pratiques bantus et le Butõ japonais, car je constate des similarités dans nos rituels. Je suis convaincu que nos pratiques nous relient en tant qu’ancêtres des Asiatiques. J’étudie des photos de mouvements Butõ et m’inspire de leur travail. Mon art vise à se souvenir et à promouvoir un partage culturel.
Ngalula MAFWATA : En parlant d’impact et de reception, Bichi Kongo est une oeuvre qui dénote, quelle en est son origine ?
Yvanovitch MBAYA : C’est une oeuvre différente que la scène parisienne ne connait pas encore. J’ai intentionnellement utilisé un tissus récupéré, qui a déjà vécu et viens y rajouter une histoire. Les personnages représentés sont issus d’une photo d’archive. Bichi Kongo c’est montrer ces visages du passé, de l’époque coloniale, comment ils étaient. C’était des personnes fortes et puissantes, ancrés dans leurs pratiques traditionnelles. Leur regard troublant crée une connexion forte entre moi et la matière. Dans cette oeuvre il y a un mélange de pigments, de café de poudre de charbon ou bois brûlé, c’est de l’encre de chine, pigment indigo que j’ai découvert au Mali en 2019. Ce travail incarne l'acceptation de soi et de son identité. Je crois qu'un être humain accompli est celui qui revendique son identité et déclare : "Je suis artiste africain, je valorise ma culture." Cette œuvre est une revendication, une arme de lutte pour la manifestation de ma culture et de ce que je veux transmettre. Dans chacune de mes expositions j’aime inclure une des ces oeuvres en toile récupérée, c’est une manière de dire merci à mes ancêtres, car c’est grâce à eux que j’en suis là. Par la même occasion je créer un univers de cérémonie et de pratiques ancestrales qui invite le public à venir voir qui ils étaient et comment ils pratiquaient leur culture.
Ngalula MAFWATA : ABLAKASSA est un projet d’envergure qui a marqué la foire AKAA, pouvez-nous nous raconter sa genèse ?
Yvanovitch MBAYA : Je me considère comme heureux invité de ce projet. L’année dernière, j’ai présenté Gâta Bantu (Un village, un Peuple) à 1-54 Marrakech, où j’y ai rencontré le curateur Roger KARERA. Avec Jean SOMIAN SERVAIS, ils sont les initiateurs de ABLAKASSA.
Le projet est né en s’inspirant de la philosophie éclairée de Bisi Silva (1962-2019) pour contrecarrer l’obsession presque perverse de vouloir être accepté à l’étranger au lieu de développer la scène locale. Ne pas exposer à Paris ne signifie pas la fin de tout. Je ne mets pas du sable dans mon attieké comme disent les ivoiriens, la reconnaissance existe bel et bien en France, à Paris cependant il faut également se rendre compte des opportunités qu’offrent l’Afrique aujourd’hui. Sans rien enlever aux artistes en occident, aujourd’hui, un artiste africain vivant en Afrique a beaucoup de choses à raconter dans l’Art contemporain. Le marché de l’Art Africain aujourd’hui est fort. Il suffit de voir les foires et évènements tels que Art x Lagos ou encore Investec Cape, la Biennale de Dakar ou autre pour voir les histoires incroyables portées par les artistes présentés. Nous avons toujours utilisé les éléments de la nature et du quotidien pour pouvoir créer nos oeuvres. D’ailleurs, je reste même persuadé que parmi les fondateurs de l’Arte Povera, certains ont dû voyager en Afrique avant de créer ce mouvement.
Roger KARERA et Jean SERVAIS ont eu la vision de mettre en lumière ces artistes déjà complets à qui il manque uniquement la visibilité, la plateforme. La première édition de ABLAKASSA a eu lieu entre Abidjan, Assinie et Grand-Bassam où plusieurs artistes du continent et de la diaspora, moi compris avons pu exposer dans plusieurs lieux. La seconde édition a eu lieu à Abidjan, à la Fondation Donwahi cette fois. AKAA n’était finalement que le troisième volet de ce qui a débuter en Afrique. C’était une manière de montrer au monde en quoi et comment notre démarche s’annonce.
Maître Aboudramane DOUMBOUYA est au centre de la curation et moi en tant que jeune artiste j’ai été invité afin de répondre à son travail. J’ai découvert son œuvre en 2014 à Lomé, alors assistant du galeriste allemand Peter Herrmann à l’origine de la découverte de nombreux artistes travaillant en Afrique dans les années 1990. En visitant son atelier, j'ai été fasciné par son travail, son histoire et me suis reconnu dans sa démarche en tant qu’artiste africain. Pour l’exposition à AKAA, j'ai imaginé des personnages performants à l'intérieur de ses mini temples pour créer une connexion avec son œuvre. Je suis honoré d’avoir pu participer à ce projet avec Roger KARERA, Jean SOMIAN SERVAIS et Mary-Lou NGWE SECKE. Valoriser et accompagner les artistes africains en Afrique et de la diaspora et surtout les jeunes artistes africains basés en Afrique est essentiel.
Ngalula Mafwata : Il est fascinant d'observer tous les ponts créés entre les acteurs de la scène africaine et de la diaspora qui collaborent pour se saisir de la narration. En tant qu'Africain de la diaspora, je pense qu'il est essentiel que nous engagions des actions sur le continent. Quel est votre regard sur la scène de Brazzaville ?
Yvanovitch MBAYA : Je vais être stricte, l’enseignement m’y oblige. J’ai visité 37 pays africains depuis l’âge de 12 ans, à pied, à moto, parfois sans que mes parents le sachent, car j’avais soif de découvrir le continent. L’Afrique étant une terre de tradition orale, j’ai beaucoup appris en voyageant et en rencontrant les gens. Malheureusement, les jeunes artistes peintres au Congo ne travaillent plus, et je connais les raisons sans vouloir utiliser des termes politiques. Je tiens à dire que le Ministère des Arts et de la Culture de Brazzaville ne fait pas assez pour soutenir les artistes. Ce n’est pas à moi de les contacter, mais à eux de s’intéresser à notre situation. À chaque foire ou événement international, je suis souvent le seul artiste congolais présent, car nous manquons d'infrastructures au Congo. En dehors des ateliers Sahm et de l’Institut Français, il y a peu d'autres lieux d’exposition. Le projet ClassPro Culture de Baudouin MOUANDA sont des initiatives rares et qui partent d’une volonté personnelle, engagée.
Le niveau a considérablement baissé car les artistes sont moins actifs. À une époque, il y avait de la compétition entre artistes, nous poussant à nous dépasser dans notre créativité plutôt que de vouloir copier. J’encourage la diaspora à venir en Afrique, acheter des œuvres, pour motiver les artistes, car le financement reste un problème majeur. Beaucoup d’entre eux exercent des métiers par défaut, comme comptable, alors que leur véritable talent réside dans l’art. Aujourd’hui, à Venise, nous avons vu les artistes du Bénin et de la Côte d’Ivoire avoir leur pavillon là où nous avons peu d’artistes congolais reconnus sur la scène internationale au point d’avoir mis sur place un pavillon. Il y en a seulement cinq ou six actuellement, en raison du manque de moyens et de représentation pour créer des œuvres et faire voyager les artistes. Lors de la foire AKAA, nous n'étions que deux artistes congolais présents, Gastineau MASSAMBA et moi-même.
Obtenir un visa talent est compliqué, surtout pour ceux qui n'ont pas un bon CV. Le manque de moyens d'accompagnement limite la capacité des artistes à exposer leurs œuvres, en particulier pour participer à des évènements capitaux comme la Biennale de Dakar. Si nous n’avons pas l'opportunité d'exposer à Brazzaville ni les financements nécessaires, cela rend le parcours encore plus difficile. J’ai observé quelques projets portés à la Biennale de Dakar par l'Atelier Sahm, mais cela reste insuffisant. Je n’affirme pas que mon travail est meilleur, je suis encore un jeune artiste en développement. Mon succès à AKAA est dû aux personnes qui m'ont soutenu, et ces gens là, force est de constater ne sont pas des congolais. Je suis reconnaissant pour leur aide cependant, il nous manque des infrastructures et des organisations étatiques, comme des anciennes usines réaménagées en ateliers avec le matériel nécessaire.
C'est le moment idéal pour agir, car le marché est particulièrement intéressé par l'art africain. Il ne faut pas manquer cette opportunité, surtout avec la résurgence de marchés comme celui de la Chine. Le Congo doit créer un pavillon pour la prochaine Biennale de Venise, et nous, artistes, sommes prêts.
Ngalula MAFWATA : Dans la francophonie nous avons des modèles d’excellence comme le Bénin et son Agence de Développement pour l’Art et la Culture
Yvanovitch MBAYA : Ce que fait le Bénin est incroyable et souligne que l’acte citoyen a son importance. Le Président nomme des personnes qualifiées pour encadrer la culture et organiser des expositions d'exception, comme ce pavillon présenté à Paris qui invite à la fois des artistes établis et la nouvelle génération. Il s'est même déplacé sans invitation pour soutenir cette initiative, ayant constaté l'engagement de ses concitoyens. Nous devons suivre cet exemple. Notre président ne se manifeste pas suffisamment, car les responsables culturels ne s'engagent pas pleinement. Ce n'est pas au Président de prendre en charge ces responsabilités. Notre Ministre fait de son mieux ; elle s'est récemment rendue au concert de Roga-Roga, mais a été huée par la diaspora, ce qui est regrettable. Malgré cela, je vois des efforts de la part de notre ministère, notamment une présence en ligne. Nous devons, de notre côté, encourager ces initiatives. Les artistes doivent travailler, proposer des projets et le ministère ainsi que les acteurs culturels doivent offrir leur soutien.
Nous avons un riche héritage artistique avec des figures comme Bill KOUÉLANY, Remi MONGO ETSION, Marcel GOTÈNE et Gastineau MASSAMBA, qui méritent tous d'être représentés dans des pavillons à la Biennale de Venise. Si nous sommes invités dans dix ou quinze ans, cela ne pose pas de problème, car cela marquerait un début. Je tiens également à féliciter les initiatives du Bénin dans ce domaine.
Ngalula MAFWATA : Quels sont vos projets ou études en cours ?
Yvanovitch MBAYA : J'ai un rêve, [rires]. Jusqu'à présent, j'ai souvent évité de traiter certains sujets à consonance politique. Jean-Michel Basquiat affirmait que les Noirs étaient sous-représentés dans l'art moderne — un message qui , malheureusement, a souvent été mal compris. Inspiré par cette idée, je souhaite poursuivre mes travaux sur l'identité. En tant que Congolais ayant quitté mon pays pour mieux me découvrir, embrasser pleinement ma culture, le passé historique de mon continent et accepter qui je suis, je cherche à transmettre cette quête à travers mon art.
Je considère l’art et mes peintures comme une chorégraphie de l'âme, reflétant nos émotions. Bien qu'on ait tendance à dissocier l'artiste de son œuvre, les gens font souvent le lien entre l'âme, l'état d'esprit et l'artiste, c’est tout le propos de mon oeuvre.
Les travaux de l’artiste Yvanovitch MBAYA sont à découvrir sur Artsy, Foreign Agent et ses espaces personnels.